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Contre le projet de mégatransformateur à Saint-Victor
et le développement de champs d’éoliennes industrielles
texte collectif de l’Amassada, lu à Rodez le 21 janvier 2017

lundi 13 février 2017, par L’Amassada

Voilà deux ans, presque jour pour jour, que nous sabrions le champagne sous la neige à La Plaine pour célébrer la naissance et la construction de l’Amassada sur les terres convoitées par RTE (Réseau de transport d’électricité). L’Amassada, cela signifie « l’assemblée » en occitan, mais au-delà de ce simple mot c’est aussi un point central et hautement stratégique qui nous permet de bloquer tout un tas de projets éoliens ;
et c’est surtout une façon au quotidien de se tenir ensemble coûte que coûte, une manière de se rapporter à la lutte contre la mise sous contrainte de nos existences, contre la mise en coupe réglée des territoires.

Ces territoires, les aménageurs, les investisseurs et un grand nombre d’élus les ont crus dociles, malléables et soumis. Bien sûr ils se trompent (comme toujours a-t-on envie de dire) ! Et nous ferons tout pour continuer de leur donner tort ! Il suffit de regarder le nombre que nous sommes aujourd’hui…

Qu’ils le veuillent ou non, nous habitons ces lieux, ces endroits, ces collines, ces plateaux, ces hameaux, ces villages qui nous sont chers. Et pour nous, habiter, ça n’est pas peu dire. Ça n’est pas une petite affaire individuelle qui s’accommode de tristes spéculations économiques.

Habiter, c’est faire corps avec ce qui nous entoure, et c’est pour ça que s’attaquer à notre milieu, c’est s’attaquer à nos vies ; couler un plot de béton dans un champ, c’est nous mettre un parpaing à la place du cerveau. Et ça il n’en est pas question !

Habiter, ce n’est pas seulement se souvenir des croquants qui se révoltent à Villefranche-de-Rouergue, des mineurs de Decazeville, des gantiers en grève de Millau et de tous ceux qui ont eu le courage de résister et de défendre leur forme de vie ; habiter, c’est aussi construire des liens avec d’autres territoires en lutte.

☀ Nous profitons de ce moment pour clamer haut et fort notre solidarité avec les insurgés de l’isthme de Tehuantepec, au Mexique, qui doivent faire face aux promoteurs et aux multinationales, ainsi qu’à leurs milices et autres groupes paramilitaires ; face à un ennemi commun, exprimer notre soutien aux communautés indigènes qui tombent sous les balles pour défendre leur existence.

☀ Nous affirmons que lutter contre un transfo, des éoliennes industrielles ou des lignes THT (à très haute tension), c’est aussi pour nous lutter au côté de ceux qui résistent et qui vivent depuis maintenant des années à Notre-Dame-des-Landes contre l’aéroport, rejoindre les copains lorsqu’il le faut, malgré la distance ;

☀ Lutter ici, c’est partager le combat de ceux qui peuplent d’une façon si belle le Val di Susa et qui s’organisent chaque jour pour contrer l’avancée de la ligne Lyon-Turin ;

☀ Lutter ici, c’est aussi se porter à Bure et faire barrage de nos corps à des ingénieurs qui préparent le cauchemar planétaire pour les dizaines de milliers d’années à venir, à des échelles qui nous échappent, lutter pour faire échec à un complexe électro-industriel qui confond les habitants de la Meuse avec des poubelles publiques.

En un mot lutter ici, c’est lutter contre des formes de gouvernement dont la vocation est d’étendre leurs solutions hégémoniques et désastreuses à toute la planète, au nom de leurs profits et pour notre malheur. C’est lutter contre des gens qui prétendent nous dicter nos comportements, contre des gens qui gouvernent par la peur et font du monde un désert. Ces tristes sires et leur monde techno-économique posent des problèmes dont ils voudraient nous tenir responsables et auxquels, en plus, il faudrait que nous trouvions des solutions ! Des solutions pour que surtout rien ne change.

Mais, face à ce désastre savamment orchestré, la seule réponse que nous devons apporter, porter ensemble, c’est une réponse politique au sens le plus riche que ce terme peut avoir. C’est se réapproprier communément, collectivement nos existences sur tous les plans, c’est l’auto-organisation dans les communes, dans les villages. C’est savoir se ressaisir de savoir-faire dont on nous a dépossédés au fil des siècles, se nourrir de coutumes disparues, inventer de nouvelles formes de vie, déserter massivement le désert qu’on nous prépare. C’est ce que nous vivons depuis deux ans à l’Amassada : festoyer, chanter, danser, construire, remporter des victoires.

Car il est clair que nous n’avons plus rien à attendre des gens qui ont systématiquement et ostensiblement étalé leur mépris et leur arrogance à notre égard, nous, habitants qui voyons nos territoire sacrifiés sans vergogne sur l’autel de leurs visées mercantiles.

Qu’il s’agisse d’élus, d’ingénieurs, de promoteurs, d’investisseurs ou d’aménageurs, ils ont largement fait eux-mêmes la démonstration qu’aucune confiance, aucun crédit ne pouvait et ne devait dès lors leur être accordé. Ni au niveau national ni à une échelle plus locale.

Que ce soit ces derniers mois un gouvernement aux abois, et à sa tête Valls qui fait passer en force une loi scélérate à l’aide du 49.3 au mépris le plus total de la colère qui s’est exprimée dans la rue ; ou que ce soit A. Marc, sénateur de l’Aveyron (entre autres mandats) qui a fait voter le huis-clos lors de la réunion normalement publique de la Communauté de communes (des Raspes et de la vallée de la Muse) qui a délibéré en faveur de l’implantation massive d’éoliennes industrielles dans la région, après avoir dégagé manu militari les habitants venus faire connaître leur opposition.

Bref, le mépris qu’ils ont pour nous n’a d’égal que notre colère et notre détermination. C’est pour cette raison qu’aujourd’hui nous sommes venus déverser la terre souillée de nos sols sacrifiés pour que le préfet sache bien que nous ne sommes pas dupes. Pour qu’il comprenne qu’aujourd’hui nous sommes venus manifester pacifiquement, mais que si lui et RTE s’entêtent nous reviendrons avec des intentions plus belliqueuses.

Nous savons que l’enquête publique annoncée depuis des mois à Saint-Victor n’est qu’un simulacre de participation, une vaste blague. Pour nous, cette enquête, c’est la première pierre de leur projet, une occasion supplémentaire pour nous jeter leur mépris au visage. C’est pourquoi nous n’y participerons pas ! Nous n’avons que faire de leurs échéances.

Ce qui nous importe, c’est de profiter et de maintenir l’élan et la force du nombre que nous sommes aujourd’hui pour nous retrouver les uns les autres, dans les mois qui viennent, et mettre en actes notre refus sur des chantiers, en des points précis du schéma qu’ils croient pouvoir nous imposer.

Ne craignons pas de faire comme aujourd’hui des dizaines, voire des centaines de kilomètres pour défier l’isolement de chacun face à l’avancée des différents projets. Ils veulent des infrastructures diffuses et dispersées pour être moins vulnérables à notre opposition, ils veulent miter des pans entiers de nos espaces : il nous faut être l’essaim, la nuée qui sait fondre et frapper par surprise là où cela est nécessaire !

N’hésitons pas à bloquer des camions ou des convois entiers comme cela a été fait il y a plusieurs mois sur l’Escandorgue, soyons prêts à entraver le bon déroulement des travaux comme ce fut le cas en Haute-Durance contre les lignes THT. Allons perturber dès que nous le pouvons les réunions feutrées d’élus sans scrupule qui soldent nos terres au plus offrant, comme nous l’avons fait en septembre dernier, au Parc naturel régional des Grands Causses en chassant les seigneurs locaux de leurs fauteuils confortables.

Jusque-là nous avons agi de façon relativement éparse. Mais aujourd’hui nous sommes là, ensemble, à plusieurs centaines et nous faisons le pari que demain, si nous le décidons, nous remporterons des victoires. Il nous appartient dès maintenant de changer l’hiver en printemps !

Vive l’Amassada ! Vive la lutte !
Pas res nos arresta !

Source : L’Amassada
24 janvier 2017.

À Saint-Affrique en 2015

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