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Du val de Suse à Notre-Dame-des-Landes, de Saint-Affrique à Châteaubriant, une vague de résistance

vendredi 7 décembre 2012, par ZAD

Rendez-vous quotidiens
- Notre-Dame-des-Landes, de 10 à 17 heures :
permanence sur la place de la Poste
(local des syndicats, angle opposé à la mairie)
pour déplacement sur la zone.
- Nantes, à partir de 10 heures :
vigie citoyenne au Pont-Morand.
- Nantes, à 19 heures, un soir sur deux :
rassemblement devant la préfecture.

Prise de parole d’occupant·e·s de la ZAD à la manifestation No TAV du 3 décembre à Lyon. Ce texte n’a pu être lu en l’état, du fait de la répression que la plupart ont subie ce jour-là.

Ami·e·s d’ici, ami·e·s d’ailleurs,

A sara dura !!!  [1]

L’écho de ce cri de colère et de révolte poussé depuis la vallée a résonné jusqu’au bocage de Notre-Dame-des-Landes.

Pendant les trois ans du mouvement d’occupation, nous étions nombreux·ses à avoir les yeux braqués sur la vallée, à fantasmer la puissance du mouvement populaire qui s’y déployait.

Aujourd’hui, nous arrivons ici porté·e·s par l’énergie folle de sept semaines de résistance sur la ZAD, porté·e·s par l’élan d’un mouvement de lutte qui a éclos pendant ces semaines de conflits.

L’aéroport n’est plus un projet, un monstre de papier, c’est une réalité matérielle et humaine : c’est nos maisons détruites, c’est la forêt éventrée par les chenilles des machines, c’est nos ami·e·s blessé·e·s et emprisonné·e·s. L’idée d’un mouvement contre l’aéroport et son monde n’est plus un rêve porté par quelques habitant·e·s isolé·e·s dans le bocage, c’est une vague de résistance en actes qui déferle, nous emporte et nous dépasse.

La ZAD n’a jamais été aussi vivante :

- les reconstructions fleurissent de toute part ;
- le ravitaillement spontané opère comme une magie qui nous submerge de bouffe et de matos, précédant nos besoins ;
- les barricades apparaissent et disparaissent, dessinant une mystérieuse et sublime géographie mouvante de l’autodéfense territoriale...

Plus la lutte se renforce et se durcit dans le bocage, et plus elle se répand au-delà du territoire. « La valle sulla citta » proclamait le mouvement No TAV en février dernier alors que la résistance prenait la forme de blocages, d’occupations et de manifs dans une flopée de métropoles italiennes...

« ZAD partout » peut-on désormais lire sur les murs de nombreuses villes en France. Plus d’une soixantaine de comités locaux organisent des actions diverses et répandent ainsi le conflit. Les formes sont multiples et sans cesse renouvelées : sabotages solidaires, occupations de mairie, blocage d’un pont sur le périph’ de Nantes par les paysans et leurs tracteurs, etc.

De nouvelles présences sur la zone dessinent une nouvelle architecture de l’occupation. Présences paysannes et usage défensif des tracteurs, allers-retours de collectifs qui s’organisent depuis leurs villes respectives, implication sans précédent des gens du coin.

Sur son propre terrain, la lutte a déjà vaincu un ennemi bien plus fort que le projet d’aéroport : elle a été capable de réduire les distances entre nous, de subvertir les rôles et d’abolir en partie les frontières entre gens du coin et gens d’ailleurs, entre associations citoyennes et formes d’auto-organisation et d’action directe, entre squatteur·euses percu·e·s comme marginal·e·s et salarié·e·s perçu·e·s comme respectables.

La lutte c’est des personnes en tout genre qui nous aident à remplir des sacs de projectiles en nous soufflant : « Mettez-leur en plein la gueule ! »

La lutte c’est un paysan exproprié qui passe devant les tribunaux pour avoir balancé des bouteilles sur les flics et regrette devant le juge… de ne pas les avoir blessés ! La lutte c’est un gars du bourg qui vient avec sa tronçonneuse sur la barricades, sourire aux lèvres !

La lutte c’est des centaines de personnes qui crient : « Vinci dégage résistance et sabotage ! »

La lutte c’est des milliers de personnes qui forment une immense chaîne humaine pour construire des cabanes en forêt !

La lutte c’est des dizaine de tracteurs enchaînés les uns aux autres pour protéger un lieu d’organisation collective surgi de terre en quelques jours !

La lutte c’est des élus dépassés par le mouvement et contraints à l’action directe pour se redonner une légitimité...

« Siammo tutti black bloc » scandait la foule rageuse au Val di Susa. « Il n’y a aucun groupuscule d’anarchistes dangereux, c’est nous tous le groupuscule, les trente mille personnes que nous sommes, main dans la main... On n’a pas peur de le dire, nous paysans on va les prendre les pierres et les bâtons », proclame soudain le porte-parole de l’ACIPA.

Si nous sommes venus à Lyon aujourd’hui, c’est que LGV et aéroport sont les deux fragments d’un même monde que nous combattons et rêvons d’abolir. Le bocage comme la vallée sont défigurés par la même logique de métropolisation, traversés par les mêmes flux, soumis au même impératif absurde de la Vitesse. Au-delà de la France et de l’Italie, d’Atenco, au Mexique, aux luttes contre les projets de mines ou de barrage, au Brésil, ces luttes débordent les frontières de l’Europe ; parce que le pouvoir cherche à imposer partout la logique de métropolisation.

LVG aéroport, tram-train, centrale à gaz, mine de charbon, stade de foot, centrale nucléaire, THT, éoliennes industrielles, lotissement HQE : contre toutes ces infrastructures qui aménagent nos territoires, contrôlent nos vies !

Comme l’écrivent nos camarades de Milan, ces infrastructures « c’est la concrétisation faite de ciment, d’acier et d’uniformes bleus, d’une conception du monde qui nous est absolument étrangère ».

Alors que la lutte contre l’aéroport prend une ampleur insoupçonnée, nous voulons que la visibilité qu’elle a acquise et que l’énergie qui s’y déploie rejaillissent sur toutes les luttes contre l’aménagement du territoire... Ces luttes participent de la même révolte contre le pouvoir ! Ce mouvement qui s’organise à la base n’est pas soluble dans les tentatives de représentation, de négociation, de pacification et de récupération.

Lutter contre le quadrillage du territoire par les infrastructures, ce n’est pas seulement porter des coups contre la métropole. On se retrouve dans une lutte contre cet aéroport mais, immédiatement, on rêve de l’usage collectif de ces terres, on imagine d’autres manières d’habiter cet espace, d’autres manières d’habiter ce monde. Lutter contre l’aéroport, c’est aussi susciter des désirs de sécession, c’est aussi effleurer la possibilité d’espaces autonomes, vivre la possibilité de la Commune.

Au début de l’opération César, la préfecture déclarait : « Si la République ne parvient pas à reprendre la zone, alors il faut s’inquiéter pour la République. » Aujourd’hui à Lyon, nous lui répondons :

« Semons la zone pour faire trembler la République ! »
A sara dura, anche in Francia !!!

Source : zad.nadir.org

Occupation de la mairie de Saint-Affrique
le 23 novembre 2012.

Appel de Saint-Affrique
le 5 décembre 2012

La lutte à Notre-Dame-des-Landes contre la construction du nouvel aéroport de Nantes est devenue depuis le 16 octobre le centre de toute les attentions. L’opération policière « César » qui prétendait faire « place nette » en expulsant et détruisant les maisons occupées de la ZAD [2] s’est heurtée à un mur : la détermination de tous les habitants des environs à ne pas laisser disparaître ces deux mille hectares de bocage sous des hectolitres de béton. Leur mobilisation s’est rapidement répandue dans tout l’Hexagone et même au-delà.

Le 17 novembre, nous étions nombreux de l’Aveyron à nous rendre sur place pour une manifestation de réoccupation. En compagnie de trente mille personnes, nous avons traversé la ZAD et édifié en son cœur un superbe village « gaulois » dans une clairière entourée de châtaigniers. La puissance collective qui est apparue ce jour-là entre les tracteurs aux remorques débordantes de matériel, les équipes de chantier sur le pied de guerre et les cuisines collectives pour mille personnes ne souffrait aucune contestation. Les autorités, lucides, firent d’ailleurs décamper leurs forces de police sous d’autres cieux pour plusieurs jours.

À partir du refus d’un aéroport, une zone de liberté et de créativité est venue ce jour-là au monde, prête à grandir autant qu’à se défendre. Un kyste pour M. Valls, un grand espoir pour nous. Mais le répit fut de courte durée : le vendredi 23 novembre, cinq cents gardes mobiles lançaient l’assaut au petit matin sur les nouvelles bâtisses. Ayant pris connaissance de l’intrusion, les plus proches voisins affluèrent pour défendre la zone et, après un âpre week-end de bataille [3], les constructions tenaient toujours bon. Le tribunal de Saint-Nazaire s’est finalement laissé jusqu’au 11 décembre pour statuer sur le sort des maisons construites le 17 novembre. Une nouvelle tentative d’expulsion/destruction est donc à craindre à partir de cette date.

Ici, dès le 23 novembre à 16 heures, la mairie socialiste de Saint-Affrique [4] est occupée. Suite à l’intervention brutale en pleine nuit de treize fourgons de CRS, les lieux seront expulsés et deux des occupants placés en garde à vue avec comme chef d’inculpation : « violence volontaire sur agent dépositaire de la force publique », en l’occurrence le capitaine Crochet, et « résistance avec violence » au gendarme adjoint volontaire Thomas. Les faits se seraient passés lors de l’expulsion menée non pas par les gendarmes locaux, mais par... les CRS de Toulouse. De plus, l’ensemble des témoignages des personnes présentes lors de cette soirée attestent de l’absence totale de violence envers les forces de l’ordre. Ce chef d’inculpation fallacieux mais néanmoins extrêmement grave (trois ans de prison et 45 000 euros d’amende) nous apparaît à tous comme une manœuvre pour le moins grossière de criminalisation du mouvement de soutien à Notre-Dame-des-Landes. Une manœuvre qui permet au passage d’arrondir les fins de mois des deux militaires de quelques substantiels dommages et intérêts. Il est inconcevable que de telles pratiques s’installent à Saint-Affrique ! Nous exigeons l’arrêt immédiat des poursuites judiciaires à l’encontre des deux occupants de la mairie.

Nous appelons donc toutes et tous, les Saint-Affricains comme les comités Notre-Dame-des-Landes des environs, et plus largement toutes celles et ceux qui refusent le tout-bétonnage et le tout-sécuritaire, à nous rejoindre à Saint-Affrique le 15 décembre.

Avant les fêtes, montrons que nous sommes nombreux et déterminés à refuser ce projet inutile et nuisible ainsi que toutes les répressions policières qui l’accompagnent. Une manifestation régionale démarrera à 16 heures place de la mairie. Elle sera suivie d’une assemblée générale de coordination des différents comités de la région pour envisager des perspectives de lutte commune en 2013. Gardarem Notre-Dame, l’aéroport ne se fera pas !

Le comité de jumelage ZAD - Saint-Affrique

Source : zad.nadir.org

Communiqué du collectif de Châteaubriant

Rassemblement hebdomadaire du collectif de Châteaubriant contre le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes chaque vendredi à 18 h 30 devant la mairie.

Ce vendredi 7 décembre et tous les autres, nous appelons tous les Castelbriantais à se joindre à nous autour d’un vin chaud, pour manifester encore et toujours notre opposition au projet d’infrastructure aéroportuaire ruineux de Notre-Dame-des-Landes.

Car enfin, qu’avons-nous à faire, nous Castelbriantais, d’avions qui atterrissent et décollent à moins d’une heure de chez nous quand il existe un réseau aéroportuaire suffisant dans la région du Grand Ouest ? Est-ce là la bonne façon de répondre aux besoins réels de notre région ? Est-ce là la bonne manière de palier les difficultés économiques et sociales de sa population ? Est-ce là la bonne façon de répondre aux problèmes environnementaux, aux catastrophes présentes et à venir ?

Il y a six mois, le nouveau gouvernement nous avait promis l’écoute et la concertation… Depuis le 16 octobre, à Notre-Dame-des-Landes, le dialogue est réglé par la force militaire. Les habitants de la ZAD, pacifiques et courageux, ont vu disparaître leurs habitations et leurs outils de travail.

Rappelons que depuis toujours les opposants à ce projet d’aéroport demandent le dialogue à Jean-Marc Ayrault. En vain.

Il y a un mois, notre nouveau député de la sixième circonscription, castelbriantais et agriculteur, Yves Daniel, s’est engagé à rendre compte à l’Assemblée nationale de la situation sur le terrain, de notre détermination comme de notre désarroi devant l’arrivée et le comportement d’une telle armada sur la ZAD de Notre-Dame-des-Landes.

Bien sûr, nous n’attendons plus de notre député qu’il se range à nos arguments. Nous voulons seulement qu’il fasse son travail d’élu, qu’il rende compte honnêtement de nos doléances. À l’inverse de cela, lors de sa première question au gouvernement, le député Yves Daniel a préféré dénigrer notre lutte et notre résistance.

Parmi les opposants, beaucoup ont contribué à sa récente élection. Mais aujourd’hui, voyant notre député, plutôt que nous représenter, devenir le valet servile des bétonneurs, nous le désavouons publiquement.

C’est pourquoi, ce vendredi, pour manifester notre déception et notre colère citoyenne, nous déchirerons nos cartes d’électeur et les expédierons directement à François Hollande, président de la République. Par ce geste, nous lui signifions que, seulement six mois après son accession au pouvoir, le peuple dont le cœur bat au rythme de celui des landes de Notre-Dame, ce peuple, déjà, ne lui répond plus.

Le collectif Châteaubriant - Notre-Dame-des-Landes

Source : zad.nadir.org

Notes

[1A sara dura, expression qui pourrait se traduire par « ça sera dur » ou « ça va barder », devenue un cri de ralliement de la lutte contre le chantier de la ligne de train à grande vitesse (Treno Alta Velocità en italien) Lyon-Turin, menée par le mouvement No TAV.

[2Initialement « zone d’aménagement différé », rebaptisée « zone à défendre » par les habitants.

[3Concernant les mutilations et autres blessures liées à l’usage systématique du flashball et de grenades de « désencerclement » sur la ZAD, voir la lettre et les photos d’un docteur de garde sur la zone.

[4Les mairies de Rodez et de Millau allaient être occupées à leur tour dans la semaine.

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