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Aux côtés du peuple kurde

lundi 7 septembre 2020, par Pierre Bance

André Métayer
Vingt-cinq années aux côtés du peuple kurde
Histoire des Amitiés kurdes de Bretagne (1994-2019)

Préfaces de Nils Andersson et Jacques Gaillot
AKB (30, square de Lettonie, 35200 Rennes)

Pourquoi s’intéresser aux Kurdes ? Pour le présent, ce ne sont pas les Kurdes par eux-mêmes qui intéressent, mais leur révolution au Rojava. Ainsi depuis sept ou huit ans, la cause kurde suscite de la curiosité en France. Encore ne faut-il pas exagérer, cet intérêt n’est souvent que compassionnel, quand il ne s’égare pas dans une exaltation qui risque fort d’être refroidie par la réalité.

Il en est dont l’engagement est plus ancien et dont la durée assure de sa solidité. En des temps où nul ne connaissait le Rojava, où le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) était suspecté de stalinisme, bien avant son abandon du marxisme-léninisme et du nationalisme dans les années 2000. Des temps, où Abdullah Öcalan, son leader, était encore libre, avant d’être kidnappé par les services secrets américains et turcs en 1999, puis emprisonné à vie dans une île de la mer de Marmara. C’était en 1994. Un petit groupe venu de Bretagne visite le Kurdistan de Turquie. Parmi eux, André Métayer. Ce qui n’aurait pu être que du tourisme militant va se muer en un engagement sous le coup de l’émotion. De ses yeux, voir un village détruit par l’armée turque comme le furent quelque quatre mille autres dans ces années de plomb, voir un peuple entier terrorisé dans ses villes et ses campagnes par la violence militaire et policière, bouleversa ces voyageurs qui prirent la résolution de se solidariser avec ces Kurdes qui paraissaient d’éternels vaincus alors qu’ils étaient d’éternels résistants.

De retour en Bretagne, André Métayer et ses camarades fondèrent l’association qui deviendra les Amitiés kurdes de Bretagne (AKB) en 2003. Il en sera le président jusqu’au passage de témoin à Tony Rublon en 2018. C’est l’histoire de cette association qu’il nous raconte dans Vingt-cinq années aux côtés du peuple kurde. Une association plus active que jamais, parce qu’en Turquie la répression d’Erdoğan est féroce et remplit les prisons de Kurdes et de Turcs qui ne se plient pas à sa volonté. Plus active que jamais, parce que la révolution du Nord de la Syrie est en péril, abandonnée par les Russes en janvier 2018, trahie par les Occidentaux en octobre 2019, les uns et les autres, malgré leur repentance, restant prêts à ouvrir la frontière à l’invasion turque, si tel est leur intérêt. Plus active que jamais, parce que la situation n’est guère meilleure au Kurdistan d’Iran, où les mollahs n’ont pas ralenti la répression, ni en Irak, où le gouvernement régional kurde se débat dans d’éternels problèmes que le clan Barzani, rivé au pouvoir, peine à maîtriser. Aussi, sans faillir, André Métayer et les AKB vont-ils continuer de dénoncer la répression, alerter l’opinion publique, soutenir les Kurdes de là-bas et d’ici.

Par la relation d’événements souvent tragiques, l’évocation d’actes de solidarité, la rédaction de nombreux portraits de personnalités connues ou de militants de l’ombre, c’est l’histoire contemporaine du Kurdistan et de la Turquie qui transparaît dans le livre. Une histoire d’hommes et de femmes indomptables : de militants syndicaux, associatifs ou politiques, de députés ou maires, de fonctionnaires, d’avocats, de journalistes, d’intellectuels et d’artistes, tout simplement de démocrates prêts à perdre leur liberté, parfois leur vie, pour l’honneur de leur pays. André Métayer humanise une Turquie que l’on ne voit plus que par ses chars, ses avions de combat, ses drones, ses navires de guerre, sa soldatesque épaulée de soudards, d’islamistes, de violeurs et d’assassins. Une Turquie dont on n’entend plus que les éructations de son proto-dictateur qui rêve de reconstruire l’Empire colonial ottoman et pour cela n’hésite pas à violer le droit international, occuper ses voisins, mettre en danger la paix au Moyen-Orient et en Méditerranée.

André Métayer ne cesse de nous le faire comprendre, les Kurdes ne sont pas les ennemis des Turcs. Ils sont les ennemis du fascisme et de l’obscurantisme. Ils ne sont pas des séparatistes. Ils veulent que chaque peuple de Turquie, du Moyen-Orient et d’ailleurs puisse s’organiser librement, en bonne entente avec ses voisins, dans une fédération libertaire, ce qu’ils appellent le confédéralisme démocratique.

Pierre Bance
Source : AutreFutur
6 septembre 2020.

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